TéléMoi

Télévision unipersonnelle

sous la forme d’éditoriaux quotidiens



Philippe TURCAT

 

Sommaire


I) Approche conceptuelle

II)La Forme

III)Le Fond



I. Approche Conceptuelle


Ce projet se situe à la convergence du Web, de l’image animée et de centres d’intérêt particuliers sur lesquels j’entretiens une réflexion depuis quelques années.

Il s’agit de :

- La communication par l’image animée, évidemment

- L’émergence de ce mode de communication sur le Web

- Son voisement dû à la particularité du media

- La modification de la polarité télévision/spectateur

- L’évolution de l’expression artistique due aux nouvelles technologies

- La quête du sens, induite par le moment économique et social

- La recherche de la sublimation de l’outil artistique au geste intellectuel pur



1.1 La communication par l’image animée


Pour avoir dirigé pendant 8 ans une société d’image de synthèse (DEUS) et, à ce titre, être intervenu dans de nombreux forums et conventions, j’ai entretenu une réflexion sur l’image animée au sens large mais aussi sur ces nouvelles images, dites par abus de langage "virtuelles", qui étaient reçues de manière très ambivalentes par le public, à savoir : une forte attirance pour elles, mélangée d’une peur que toutes les manipulations deviennent possibles.

Les questions concernaient un vaste éventail qui allait de l’information mensongère au mythe de la caverne de Platon. La peur de ne plus pouvoir savoir où est la vérité était, bien sûr, sans commune mesure avec celle d’être simplement trompé.

Les divers éléments de réponse à cette problématique s’articulent tous autour d’un pivot simple : l’intention du communicateur.

TéléMoi sera un laboratoire interactif d’essai sur l’intention.



1.2 L’émergence de ce mode de communication sur le Web


En 15 ans, l’évolution de la technologie a bouleversé la mise en oeuvre de l’image animée. On est passé des caméras tri-tubes Ikégami 95E (800 Kf l’unité) aux caméras DV (10 Kf avec la sacoche), et des régies numériques à

6 Millions au Pentium 300 en promo chez Carrefour (4 995 Francs) avec une très légère baisse de qualité.

Aujourd’hui l’image broadcast est un produit domestique.

Avec la mise à disposition par les informaticiens, qui sont devenus dans le même temps les enfants de vos voisins de palier (et non plus les rares ingénieurs de haut niveau qu’ils étaient) de possibilités simplissimes et très efficaces de compression, il ne manquait plus que l’existence d’un support physique de diffusion, le Web, pour avoir tous les ingrédients d’une extraordinaire mayonnaise à venir : une espèce de télévision totale.

TéléMoi veut être un laboratoire opérationnel et un lieu d’échange actif autour de cette émergence.



1.3 Le voisement par rapport au media


Sur ce media protéiforme où chaque spectateur est en passe de devenir lui aussi un émetteur, rien ne peut suggérer qu’on communiquera comme sur les chaînes de télévisions traditionnelles. Au contraire tout laisse à penser que la communication par l’image animée s’inscrira plutôt dans l’axe de celle qui a déjà émergée : une communication débarrassée de sa forme (ce qui est faux puisqu’elle en trouve une différente), en tout cas plus directe, montrant moins d’artifices et de technique (bien qu’elle en utilise autant), en résumé : au service d’une illusion d’immédiateté et de transparence.

Évidemment l’exploration de cette topologie revisitée sera l’objet d’expériences diverses et variées sur TéléMoi.


1.4 La modification de la polarité Télévision/Spectateur


L’arrivée de l’image animée sur le Web est sujette à des limitations

importantes : la mauvaise qualité et la dimension de l’image, imposées par la faible bande passante.

Mais, même en se projetant à quelques années d’évolution technique, la télé sur le Web ne ressemblera pas au mass media qu’on connaît, plutôt semble-t-il à quelque chose d’intermédiaire, plus prêt de la communication de personne à personne, en raison de l’interactivité et de la grande instabilité du consultant, vu la richesse de l’offre du Net.

Pour l’exprimer différemment : la possibilité d’interagir et son libre choix changent le positionnement du spectateur et donc son attente, dans un milieu où il est là de façon active et peut partir à l’autre bout du monde en un clic de souris.

Le contact avec cette personne là est à inventer.



D’autre part, on assiste à la naissance d’outils puissants (la norme Mpeg4, par exemple) permettant de structurer différemment le discours et de sortir de sa linéarité. Ces outils sont susceptibles de suggérer de nouveaux modes d’écriture (dit-on), ou tout du moins d’imposer aux auteurs (qui veulent naturellement être compris !) une scénarisation différente, une nouvelle forme de maîtrise d’un sens devenu "techniquement éclaté".

Voir l’approche TéléMoi de ces concepts.



1.5 L’évolution de l’expression artistique due aux nouvelles technologies


En tant que président de l’association Art et Mutations Technologiques, il m’a été donné d’aborder la position de cet artiste nouveau qu’est le concepteur d’objets vidéo-informatique.

Je reproduis en annexe un texte sur la trans-apparence qui tente de déblayer le positionnement de cette expression artistique, de l’identifier et de montrer néanmoins la communauté de ses racines avec n’importe quelle démarche artistique conventionnelle.

C’est, en tout cas, cette veine dont l’exploration me parait la plus attirante dans le projet parce que sujette à de nombreuses découvertes.



1.6 La quête de sens induite par le moment économique et social


Trente ans après l’écriture de "La Société du Spectacle" de feu Guy Debord,

qui a stigmatisé d’une façon visionnaire les pertes et les retournements de sens induits par la mise en image de la vie publique et sociale, il semble que les apparentes difficultés économiques, et, en tout cas, leurs sollicitations quotidiennes de questionnement et d’inquiétude, poussent les individus à une recherche plus aiguë de Sens (avec un grand S).

L’abdication du politique devant l’économique (par exemple : la mise au second plan de tout projet de société face à la santé monétaire) prive les citoyens des pays riches de la vision rassurante qu’ils pouvaient avoir d’une société en progrès social et les renvoie à une problématique manifestée de survie.

Contre toute attente, même chez les plus démunis, passée la douleur qui est effective, c’est l’inverse d’une position de désespoir que l’on recueille, mais souvent le sentiment de la traversée d’une "étape critique", pas forcément nécessaire, derrière laquelle existe une possibilité de réorganisation des valeurs et des priorités.

TéléMoi est un outil parfait pour soulever les contradictions du discours contemporain (dit "unique") et le confronter aux réalités du désir des individus, réels opérateurs de ce monde.



1.7 La sublimation de l’outil artistique au geste intellectuel pur


Les happenings des années 70 ont montrés que l’art pouvait s’affranchir de "l’objet artistique". Aussi grandioses que soit les toiles de Matisse, elle sont surtout la manifestation obvie de la fabuleuse évolution de sa démarche vers la simplification et la pureté du geste.

C’est dans ce témoignage renouvelé qu’elles prennent leur valeur, pas dans leur existence objective de toile et de papier découpé.

L’oeuvre envisagée de TéléMoi n’est pas le programme lui même (qui sera stocké et consultable à la demande) mais bien sa trace dans le public.

L’existence d’un humain pensant est un geste artistique en lui même.

C’est la source de toute création de richesse, la base fondamentale de l’échange marchand et un mouvement infime de la pensée d’un seul être peut conduire à la modification de l’environnement de tous les autres.

Le Web offre une possibilité jamais explorée de contact avec les spectateurs, mais le retour de ces derniers prend son sens et sa force en manifestant l’effet de l’intervention créatrice : l’oeuvre elle même.


Pour être plus clair et par analogie au cinéma, ce n’est pas les films en eux mêmes qui importent, mais tous les moments d’émotion où les spectateurs sortent des salles avec le sentiment que leur vie ne sera plus tout à fait pareille.

C’est ce qui rend le cinéma irremplaçable et c’est des instants de ce type qui apporteront à TéléMoi sa substance.



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II. La Forme


2.1 Qui parle ?


TéléMoi est un discours unipersonnel, en face à face électronique avec le spectateur ou, parfois, avec la personne à laquelle je m’adresse directement.

(voir les exemples d’éditoriaux joints) sans considérer que d’autres regardent.

C’est moi qui suis dans l’image et qui parle à la caméra, mais quand je m’adresse à un individu déterminé, je deviens une voix qui pourrait être celle de chacun des spectateurs, mais sans jamais parler en leur nom.

Ce choix ne vient pas d’un excès de narcissisme de ma part, et certainement pas d’une fascination immodérée de mon image, mais d’une double volonté consciente et pragmatique:

• La volonté d’explorer pourquoi et comment l’opinion individuelle a progressivement perdue toute crédibilité dans nos sociétés avides d’information.

N’est reconnue que la parole "au nom de…" (groupe politique, association, etc.) ou la parole d’expert ou de vedette, ce qui revient au même puisqu’on y prend acte de la notoriété comme d’un résultat électoral de fait.

Peut-on y voir là la source de ce qu’on nomme "la pensée unique", non pas comme un mode imposé par une quelconque instance capable de diriger nos esprits, mais comme un résultat statistique d’une expression coupée de sa source diversifiante et multiplicatrice : l’individu ?

TéléMoi veut chercher ce qui se cache derrière ce lissage.

• La volonté de libérer totalement le discours qui est humainement assumé et transmis par son auteur sans intermédiaire et sans fioritures (pas d’acteur, de chef opérateur, pas de mise en scène apparente).

C’est dans cette liberté manifestée que le discours prend son poids, par contraste avec sa fragilité individuelle.



2.2 Comment ?


Bien que parlés, les éditoriaux seront écrits afin d’affiner leur contenu.

Je suis soumis à une contrainte de production (1 à 3 minutes par jour) qui nécessite un travail d’écriture en amont pour permettre le mûrissement en parallèle de plusieurs sujets, et le choix de celui du jour.

Comme l’actualité peut évidemment être source de réflexion et d’intervention, ces sujets "de fond" permettront d’assurer une continuité de la chaîne.

Néanmoins comme le montre les exemples joints, c’est une écriture "parlée" qui ne sera pas récitée ou dite comme un texte, mais gardera la fraîcheur de l’impromptu.

Je peux m’arrêter, regarder ma feuille ou mon écran, déraper sur quelque chose qui me revient à l’esprit, reprendre ce que je disais, etc.…

Le discours ne sera pas nettoyé de ses lapsus, ni de ses silences, ni de tout ce qui peut lui donner sa réalité événementielle.

TéléMoi se trompe et rectifie en direct, ou pas, TéléMoi est un discours vivant.



2.3 De quoi ?


TéléMoi est affranchi du mieux pensant culturel et de l’autocensure inhérente aux mass media, la chaîne aborde tout les sujets, en vrac, que ce soit d’actualité ou pas et sous l’angle le moins conventionnel.

C’est une opinion d’individu qui ne se cache pas derrière une carte de visite de groupe de communication.

Un journaliste de chaîne ne peut pas s’adresser en son nom à un président.

Un humain, oui!

Cette étonnante facilité retrouvée se suffit à elle même et invalide toute nécessité de provocation au profit d’un questionnement émergent :

Que doit-on faire d’un citoyen qui pense et dont on sait qu’il pense parce qu’il pense publiquement sur le Web ?

La position, elle même, est polémique.

Un autre des effets secondaire souhaité serait aussi de renvoyer à la provocation sous-jacente des média , "Ces images sont extrêmement dures, mais il est de notre devoir de journalistes de vous les montrer…" pour introduire quelques meurtres en réel à 20 heures entre la salade de tomates et la plat de résistance.


Ce qui sera mis en valeur sur TéléMoi, c’est la spécificité de l’angle, tout ce qui différencie TéléMoi de la télévision traditionnelle (et y renvoit !).

(Voir Le Fond et les exemples)





2.4 Talkin’ head


Le nom de ce groupe des années 80 vient de celui que l’on donne au USA au speaker du journal, filmé comme une "tête qui parle".

C’est devenue LA mise en page du discours à la télévision, dont Raoul Sangla me disait (je cite mon souvenir plus que ses phrases exactes) : "Ca ne sert à rien de filmer le journal en gros plan. En fait, le plan large rendrait l’information plus crédible. C’est les présentateurs qui veulent que leur épicier les reconnaissent !"

A ce jour, l’angle "rédactionnel" des webcams actives, c’est d’être posées au gré d’un supposé hasard pour rendre compte en temps plus ou moins réel,

non pas d’une existence mentale de leurs propriétaires, mais du compte-rendu graphique de leurs activités domestiques, y compris sexuelles, car cela génère plus de connexions.

Au départ, car je serai libre de modifier et d’essayer d’autres cadrages, celui qui est choisi est un cadrage intermédiaire entre le minimalisme des informations télévisées et la webcam oubliée. Je pense à une focale plus ouverte que le journal et une position un peu élevée, décalée d’un côté, pour obtenir une légère plongée, comme si la caméra était au dessus d’un écran (là où elle sera peut-être puisque j’envisage de me servir directement du traitement de texte comme d’un pense-bête).

L’ensemble devrait faire penser à une image de caméra de surveillance un peu trop proche pour être honnête.



2.5 Le Naturel


Je ne suis pas dupe et bien trop amoureux du cinéma pour croire qu’il est possible de ne pas mettre en scène. On sait que l’existence même de la caméra crée inévitablement un point de vue, un point visé, un cadre et un champ.

C’est la raison pour laquelle j’ai émaillé de commentaires interrogatifs les phrases qui décrivaient une image censément non fabriquée.

La volonté qui fonde le rapport à l’image dans ce projet, c’est de trouver une syntaxe spécifique à partir d’une approche minimaliste, suffisamment associée au journal télévisé, dans l’esprit de mes contemporains, qu’elle pourra être perçue comme une non-image et renforcer d’autant plus le texte.

Dans l’idée de mettre de la vidéo sur le Web avec un rôle si restreint, la contradiction n’est qu’apparente. L’image "prouve" de nombreuses choses, et entre autres : L’orateur est vivant, en chair et en os, avec sa complexité et son imperfection d’humain. Il prend le risque de l’image (opposé au coup de téléphone anonyme) et ce qu’il dit est donc probablement important.

Évidemment TéléMoi se réserve la possibilité de faire évoluer cette syntaxe de base de toutes les manières à explorer.

L’une d’elle paraît assez évidente, c’est par l’apparition probable d’un invité, ou d’une personne désirant prolonger ou détailler un thème.



2.6 Le minimalisme


Il s’agit là d’un choix a priori mais plusieurs raisons en confirme l’intérêt.


Comme je l’ai expliqué plus haut, c’est une volonté artistique fondamentale et en rapport avec le renforcement du contenu que de s’adresser au spectateur dans une forme apparemment simplifiée.

Mais, c’est une façon supplémentaire d’assurer la viabilité du projet, tant sur la quasi-absence de mise en oeuvre quotidienne nécessaire que sur l’optique d’un faible coût de mise en oeuvre, pour que l’équilibre économique de ce projet se limite, pratiquement, à l’acquisition de la bande passante.



2.7 MPEG 4


Qu’il s’agisse de cette norme là ou d’une autre semblable, les possibilités de liens hyper-image (comme on dit hyper-texte) permettent d’inaugurer le jeu suivant :

- Le jour même, le discours est simplement sous-titré en anglais, en synchro avec l’image.

Il est évident que je ne veux pas couper TéléMoi de son possible impact international, mais je parle dans ma langue, celle dans laquelle j’associe le plus vite et je pense le plus clairement, celle dans laquelle mon geste mental est le plus précis, le Français.

- Les jours suivants, l’intervention qui a perdue sa primauté de direct, est archivée et toujours consultable. L’expérience dira combien de jours devront être accessibles les éditoriaux, si ils devront être classés par date ou en "meilleures interventions", etc. Je pense qu’il est intéressant d’archiver la semaine courante et la précédente (10 à 15 minutes) pour inciter, au moins, à une consultation hebdomadaire.

Par contre ces interventions archivées seront complétées d’informations hors-champ. Par exemple, je peux dire :

"J’ai lu un bouquin d’un type génial…" et continuer mon discours sans préciser ma source. C’est le rôle de l’outil hyper-image de permettre par un clic d’accéder au titre, à l’auteur, l’éditeur ou même, le site Web si celui ci existe. Le discours de l’orateur a d’autant moins à s’interrompre pour donner cette information qu’elle peut être accessible à qui la désire, en son temps.

Elle n’est pas cachée, elle s’efface devant la continuité porteuse de sens.

Le décalage temporel entre l’information parlée et l’information qualifiée induit une fidélisation autant qu’un sentiment de mûrissement du discours.

Et si les consultants, forts de savoir que les archives sont plus complètes et mieux ficelées, allaient directement aux archives, ils ne pourront pas ne pas aller voir ce qui se passe pendant ce temps, en direct, sous leur nez.



2.8 Le retour spectateur


Sans nécessité donc de jouer la provocation, TéléMoi nourrit fermement l’intention de secouer ses spectateurs. La position dialectique prétendument faible du "C’est ce que je pense !" incite à la répartie.


En dessous de l’image seront présentes 2 adresses, l’une purement technique, l’autre éditoriale permettant l’intervention écrite.

Il ne s’agit pas d’un "chat" mais d’un forum.

Il est possible de mettre à disposition une adresse FTP permettant la réception de produits filmés par les spectateurs et que nous choisirons de mettre en ligne en fonction de leur adéquation à la charte TéléMoi.


Ce ping-pong intellectuel sera vivement sollicité, même de vive voix par moi même, sous la forme de questions, de demandes d’informations ou de sources. J’ai décrit dans la partie conceptuelle de ce projet à quel point il est important sur le plan de l’oeuvre.

On peut aussi y voir une source multiplicatrice du contenu des programmes différés de la chaîne et de l’élargissement du discours, soit par la controverse, soit par le renforcement de l’argumentation, soit par l’information qu’il apporte sur l’adéquation à ce qui a été dit à l’antenne.

Un suivi statistique peut être livré au spectateur.

TéléMoi peut parfaitement annoncer que 98% des consultants ont haït telle ou telle intervention. La haine est une donnée événementielle et aucun Audimat ne sanctionnera l’antenne.


La ligne éditoriale n’en sera d’ailleurs pas pour autant modifiée, pour trois raisons :

- Je ne parle que de ce qui m’intéresse parce que c’est la seule chose dont je parle bien.

- Je suis à la recherche, non pas de ce qui attire le spectateur, mais de ce qui donne du sens, c’est à dire : de ce qui ce qui le sollicite, et aucune moyenne statistique ne peut laisser présager de cette dynamique.

- C’est plus intéressant d’aller à la recherche des raisons pour lesquelles un éditorial n’a pas plu, ou n’est pas passé, que de prolonger mollement les sujets qui ont intéressés les spectateurs.


TéléMoi doit permettre de voir si le sentiment d’inertie de la pensée ne vient pas du fait, qu’aujourd’hui, dans l’immense pluralité médiatique qui nous entoure, une pensée minoritaire a toutes les chances de le rester.

 

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III. Le Fond


3.1 Le fond du discours


Le fond est soumis à une ambiguïté sensible. Il est à la fois important et pas du tout important.


La meilleure façon de vous le faire sentir, c’est sans doute de vous en donner des exemples. Quelques uns sont joints.


Cependant il est intéressant de tenter de décrire cette ambiguïté.

Le fond est important parce que, à priori, on n’a pas de temps à donner à l’écoute de n’importe quel discours. C’est sur ce choix documenté que se fonde la crédibilité des journaux, qui masque sous couvert d’objectivité absolue,

la subjectivité qui les individualise et les fait vendre.

Ma position vis à vis de cette problématique est de traiter seulement des sujets qui sont importants pour moi. Il s’agit d’une grille de choix éminemment subjective, mais qui en vaut bien une autre.

De cette façon je cerne le lieu de création, je marque le noyau identitaire.


Vous pouvez faire couler de la peinture de 6 mètres de hauteur sur une toile, vous ne serez jamais Jackson Pollock. Etre artiste, ce n’est pas appliquer une technique ou un procédé, c’est Etre.

De la même façon même si le procédé TéléMoi est copiable facilement par qui voudrait, il ne peut pas être détaché de sa marque identitaire, les lacaniens diraient de son individuation.

Et si les images sont retransmises, volées, truquées, etc…c’est encore moi, au premier chef, qui m’y exprimerai !

Évidement, je ne compte pas faire l’économie de l’humour et de la faconde (que je pense avoir), mais je ne compte pas distraire, ni faire rire.

Les interventions ne sont pas des sketches, ce sont des opinions.


Mais sous un autre aspect, la grande liberté que je m’autorise dans le choix de mes sujets vient de la non-importance de ceux ci. Cette situation est inhérente à la communication par l’image. Pour l’illustrer, nous savons tous que le cinéma pourra encore nous coller dans nos fauteuils avec une histoire d’amour qui, pour être unique, passera par tous les lieux, milles fois visités, de toutes les histoires d’amour. La topologie de l’histoire d’amour n’est pas extensible à l’infini, la façon de la parcourir, elle, oui !

Il en est de même de n’importe quel sujet.

C’est pour cette raison que je parle souvent de "geste", à l’instar de la chorégraphie.



3.2 Le Sens


Connaissez vous la parabole de la lettre perdue de Proust ?

Avez vous cherché des lunettes qui sont sur votre nez ? Ou un introuvable stylo précieux et nécessaire qui est posé là, devant vous, sur votre bureau ?


C’est une vision très romantique que de penser que les avancées humaines sont issues de concepts glanés hors du champ de la connaissance, dans un ailleurs qui contiendrait tout ce qui n’est pas encore découvert.

"J’inventerai des mots que tu comprendras…" (Brel - Ne me quitte pas)


En fait c’est presque toujours le contraire qui se passe, dans le champ même de la recherche, un éclairage nouveau apporte la nécessité de subdiviser un concept en plusieurs autres capables de décrire une réalité nouvelle.

Si on prend les recherches sur l’atome, depuis cet a-tomos (insécable) de la fin du siècle, on est descendu au noyau, puis au protons/neutrons puis au quarks, c’est à dire un voyage de 10-8 mètre dans la description.

Tout cela était contenu dans l’opaque notion d’atome et Brel a, justement, écrit une très belle chanson sur toutes les choses absurdes qu’on est capable d’imaginer faire pour ne pas être quitté par l’être aimé.


Le message de TéléMoi est absolument invisible parce qu’il est montré ostensiblement, il est introuvable parce qu’il est devant les yeux du spectateur, il est inaccessible parce qu’il est offert.



3.3 Le fond de ma pensée


Peut-être ressortira-t-il des quelques éditoriaux qui sont joints à ce dossier, mais ce qui gouverne cet action dans cette société qui se cherche, qui crée de la pauvreté, qui a du mal à décrypter un futur rassurant et dont l’ensemble des humains semble préférer ne plus rêver plutôt que de se réveiller déçu devant la surpopulation ou d’autres fléaux menaçants, qui "mondialise" l’économie en même temps que la pollution, c’est le sentiment profond que contre toutes apparences, on est pas très loin de pouvoir construire des projets politiques de bien meilleure qualité que ce qu’on a pu faire jusqu’à présent, à condition qu’on arrive à se le dire !


Et si je me trompe, ça vaut quand même la peine d’essayer.

3.4 Les étapes suivantes


L’écriture, bien sûr, est la prochaine étape de travail pour créer un fond de catalogue conséquent qui permettra de piocher au grès de mon humeur et d’assurer une continuité d’antenne.


Avec l’aide de Fred Wallich, sur le site d’expression ouvert dont il s’occupe (toonet.org), je projette d’essayer en grandeur réelle quelques diffusion qui nous donnerons une idée plus précise des moyens techniques nécessaires.


En dehors de l’aide à l’écriture possible et que j’espère, je pense que le passage de ce dossier à la SCAM constituera un précédent signifiant, une ébauche de protection de l’idée ainsi qu’un premier contact avec public qualifié dont la réaction m’importe et me sera sans doute très utile.


Les exemples d’éditoriaux qui suivent sont datés du jour de leur écriture.

Il font environ 3 000 signes chacun.

J’ai essayé d’y couvrir plusieurs directions de sujets et d’intentions afin de montrer que le champ peut en être très vaste.